Les elfes appartiennent à la mythologie inferieur scandinave comme bien d'autres êtres fabuleux. Difficiles à appréhender dans les textes en raison de leur nature incertaine, ils connaissent pourtant une renaissance littéraire à l'époque moderne.
Dans l'ancienne Scandinavie, il semble que les elfes formaient une espèces de créatures mythologiques à part entière, à côté des dieux, des géants, des nains et des humains. Les formules Aesir ok Alfar ("Ases et elfes") ou Hvat er med asum? Hvat er med alfum? (qu'en est-il chez les Ases, qu'en est-il chez les elfes) pourraient cependant aussi se référer à un ensemble de créatures mythologiques.
Les traditions anglaise et scandinave
Cette catégorie peut, d'une part, être interprétée dans le sens d'esprits de la nature, en vertu de quoi on peut citer des termes précis que recèle le vieil anglais: bergaelfen (elfes des montagnes), landaelfen (elfes des champs), waeteraelfen (elfes des eaux) et wuduaelfen (elfes des bois). D'autre part, on pourrait également imaginer que les elfes sont issus de la vénération des ancêtres: pour la période préchrétienne tardive, on trouve en norrois une indication concernant un alfablot (sacrifice aux elfes) en Suède, sans doute lié à un culte de la fertilité, ainsi que le roi légendaire Olafr Geirstadaalfr, qui fut vénéré encore après sa mort par la population, et pour cette raison fut appelé "l'elfe de Geirstadir" (Yngliga saga, 49). Parmi les ancêtres du premier roi de l'ensemble de la Norvège, Harald Harfagri (Harald à la belle chevelure), on trouve d'ailleurs un certains nombre de noms formés avec alfr. La tradition anglaise et la tradition scandinave pourraient s'expliquer de la même manière si l'on voyait dans les elfes des esprits d'ancêtres défunts. Le fait que, en vieil anglais, des affections telles que le lumbago soient associées aux elfes, ainsi que le fait que dans la Scandinavie médiévale les elfes étaient presque exclusivement porteurs de maladies, va contre une telle interprétation. cet aspect est authentifié par toute une série d'amulettes qui comportent des sorts pour contrer les elfes, gravés dans le plomb, et qui les mettent parfois explicitement au même plan que les démons; ainsi, "je vous conjure, démons ou elfes" (amulette de schleswig) ou "je vous conjure, elfes (masculin) et elfes (féminines), ou démons" (amulette du jutland).
La distinction des elfes par Snorri
Snorri Sturluson, déjà au XIIIe siècle, a du composer avec d'une part la vénération dont les elfes faisaient l'objet, et d'autre part avec leur rôle manifestement négatif, quasi simultané, de démons porteurs de maladies. Dans son Edda en prose, il introduit une nouvelle répartition, teintée de christianisme, entre elfes lumineux, elfes sombres et elfes noirs. Les elfes lumineux vivent à Alfheim. Le mythographe islandais les dépeint comme des êtres d'une grande beauté, " plus beaux que le soleil et plus brillants que les étoiles"; les autres elfes, en revanche, sont "plus noirs que la poix". Snorri Sturluson identifiait possiblement les elfes lumineux et les elfes sombres à des anges ou à des démons, tandis que les elfes noirs désignaient de surcroit les nains (qui résident par ailleurs au Svartalfeim, le "monde des elfes noirs"). Il est cependant envisageable que cette dualité renvoie a deux aspect du culte des elfes en Scandinavie, à savoir celui de la fécondité pour les elfes lumineux, et celui de la mort pour les elfes sombres. La tradition anglaise va dans le sens opposé à la conception de Snorri Sturluson, comme l'atteste le terme aelfsciene (beau comme un elfe), ou la signification clairement positive de noms vieil anglais tels que aelfbeorth (elfe étincelant) ou aelfred (elfe avisé)
Dans les chants de l'Edda, les elfes ont un rôle qui semble presque correspondre à celui des dieux (aussi a t-on pensé aux Vanes), ou du moins correspond à une catégorie mythologique d'un grand âge, digne d'être vénérée. Les sources ne permettent pas d'exclure l'idée selon laquelle les elfes seraient une ancienne classe de dieux, peut être des divinités élémentaires que l'on vénéraient à travers la mer, les forets ou les collines. L'élément spatial entre aussi en ligne de compte en Scandinavie, car Snorri Sturluson, cette fois dans sa heimskringla (histoire des rois de Norvège), nomme Alfheimar ("terre des elfes") la région du sud Est de la Norvège et du sud ouest de la Suède (Ynglinga saga, 48). On ne néanmoins savoir si il savait quelque chose à propos d'un culte voué aux elfes dans cette région ou s'il s'appuyait simplement sur des éléments généalogiques.